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Personne et famille

Publié par - 3 juin 2022

L’alinéation parentale peut-elle engager la responsabilité civile d’un parent?

L’aliénation parentale est un concept souvent mal compris parmi notre société et il peut être difficile d’en faire la preuve devant le cadre d’un litige familial. Ce concept est défini par la jurisprudence comme étant une situation dans laquelle un parent, consciemment ou inconsciemment, programme et endoctrine négativement son enfant au détriment de l’autre parent.[1]

Pour la première fois en droit québécois, dans une décision rendue récemment en droit de la famille[2], une juge de la Cour Supérieure a considéré que les comportements aliénants d’un parent peuvent engager la responsabilité civile du parent fautif.

Dans cette décision, la mère réclamait devant le tribunal des dommages-intérêts au père pour la perte d’affection de leur enfant à son égard, et ce, à raison de 25 000$ par année pour les cinq années depuis la rupture totale des liens avec celui-ci, pour une somme totale de 125 000$.

Tout d’abord, la juge détermine qu’il n’existe aucune immunité pour les agissements des parents dans l’exercice de leur autorité parentale. Elle en conclut qu’il est alors possible d’appliquer le régime de responsabilité civile. Ainsi, la responsabilité civile d’un parent peut être engagée envers l’autre parent, s’il est prouvé que le parent fautif a commis une faute dans l’exercice de l’autorité parentale, que l’autre parent a subi un préjudice, et qu’il existe un lien de causalité entre la faute du parent et le préjudice subi.

Appliquant ces principes aux faits en l’espèce, la juge détermine que la responsabilité civile du père est engagée envers la mère. En effet, l’aliénation parentale effectuée par le père envers leur enfant a causé la rupture de la relation maternelle. Il a été décidé que le père, par ses agissements, a manqué à la norme de conduite d’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances. La juge est d’avis que durant ces cinq années, le père a entretenu et alimenté le conflit entre la mère et leur enfant. Par son comportement, le père a renforcé et cristallisé la fin des liens entre l’enfant et la mère, ce qui constitue une faute selon le tribunal.

La Cour conclut que cette faute a causé un préjudice à la mère. De manière discrétionnaire, la juge a fixé un montant de 30 000$ à titre de dommages-intérêts compensatoires.

Cette décision de la Cour supérieure vient dessiner une nouvelle dimension aux obligations des titulaires de l’autorité parentale. Elle pourrait influencer les éventuelles décisions rendues par les tribunaux en droit familial lorsque les faits présentes des cas d’aliénation parentale. Ce jugement constitue un développement majeur en cette matière, en considérant au surplus qu’il n’y a eu aucune preuve produite devant la juge en l’espèce venant appuyer la faute, le préjudice, le lien de causalité ou la quantification des dommages octroyés.

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Le présent texte ne représente qu’un survol de la question juridique et ne constitue aucunement une opinion juridique en soi.

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[1] OTIS, Rodrigue, Effets de la séparation des parents sur l’adaptation de l’enfant en fonction de différentes modalités de garde; un relevé des écrits expérimentaux. Développements récents en droit familial (1995), Les Éditions Yvon Blais inc., p. 109 à la p. 114 cité dans Droit de la famille – 162621, 2016 QCCS 5162

[2] Droit de la famille – 22741, 2022 QCCS 1681

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