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Droit immobilier

Publié par - 31 juillet 2025

Malgré la popularité des condos au Québec et bien que ce régime de copropriété divise existe ici depuis les années 70, les dispositions législatives régissant ce mode de propriété sont demeurées pratiquement inchangées depuis la réforme globale de notre code civil en 1994. D’importantes modifications ont cependant été amorcées depuis 2018, lors de l’adoption du Projet de loi 141, qui a été sanctionnée le 13 juin 2018 et pour laquelle certaines dispositions sont en vigueur depuis le 13 décembre 2018. Puis lors de l’adoption du Projet de loi 16, sanctionnée le 11 décembre 2019 et pour laquelle certaines dispositions sont en vigueur depuis le 10 janvier 2020. Finalement, lors de l’adoption du Projet de loi 41, sanctionnée le 17 mars 2020 et pour laquelle certaines dispositions sont en vigueur depuis cette date. Cependant, les dispositions les plus importantes prévues à ces trois projets de loi, soient les règles quant à l’étude et au maintien du fonds de prévoyance, quant à la confection du carnet d’entretien et à l’obligation de fournir une attestation sur l’état de la copropriété à tout acheteur potentiel d’une fraction, devaient entrer en vigueur plus tard, lors de l’adoption par le gouvernement d’un règlement en ce sens.

C’est maintenant chose faite. Paraissait le 30 juillet 2025 à la Gazette officielle du Québec le décret 991-2025 mettant en vigueur à compter du 14 août 2025 le Règlement établissant diverses règles en matière de copropriété divise (ci-après le « Règlement »).

LE FONDS DE PRÉVOYANCE DE L’IMMEUBLE

Le syndicat a toujours eu l’obligation de constituer un fonds de prévoyance destiné uniquement aux réparations majeures et au remplacement des parties communes, en fonction du coût estimatif de ces réparations et de ces remplacements. L’article 1072 CCQ prévoyait que la contribution des copropriétaires à ce fonds était au moins de 5 % de leur contribution aux charges communes. Bien que la fixation d’un minimum de 5 % de cette contribution ne diminuait en rien l’obligation du syndicat de baser la contribution des propriétaires sur une analyse de la durée de vie et du coût de remplacement dans le temps des composantes des parties communes, une croyance semblait s’être établie que la contribution était basée sur ce seul critère de 5 %.

Le critère de « 5 % » disparait dans ce nouvel article 1072 CCQ. Dorénavant, chaque syndicat devra obtenir minimalement tous les 5 ans une étude qui confirmera que le fonds de prévoyance sera suffisant pour couvrir le coût estimatif des réparations majeures et des remplacements à effectuer aux parties communes durant les 25 prochaines années, basé sur la description faite au carnet d’entretien. Les sommes qui devront être versées par les copropriétaires au fonds de prévoyance devront être fixées sur la base des recommandations formulées par l’expert lors de son analyse du fonds de prévoyance.

Cette étude ne pourra être faite que par un membre d’un des ordres professionnels suivants :

  • Ordre des ingénieurs du Québec ;

  • Ordre des évaluateurs agréés du Québec ;

  • Ordre des architectes du Québec ;

  • Ordre des technologues professionnels du Québec ;

  • Ordre des comptables-professionnels agréés du Québec.

De plus, les activités professionnelles de cette personne (sauf pour un membre de l’ordre des comptables-professionnels agréés du Québec) devront concerner principalement la gestion, la construction, la rénovation ou l’inspection immobilière. Cette personne ne pourra effectuer une telle analyse pour un immeuble pour lequel elle ou son conjoint est copropriétaire, résident, occupant, gérant, membre du conseil d’administration de la copropriété ou si elle est actionnaire, dirigeant, administrateur, actionnaire ou employé d’une personne morale propriétaire de l’immeuble, qui l’occupe ou en est le gestionnaire.

Cette étude du fonds de prévoyance devra contenir le montant total présent au fonds de prévoyance à la date de réalisation de l’étude, une estimation du coût de chaque réparation majeure et de chaque remplacement à l’année de réalisation indiquée au carnet d’entretien. Une recommandation sur le montant minimum devant être disponible au fonds de prévoyance au début de chaque année et sur les sommes à y verser annuellement, en précisant, le cas échéant, la part de ce montant qui est réservée pour le financement des réparations majeures aux parties communes à usage restreint et au remplacement de ces parties.

Pour les copropriétés établies avant l’entrée en vigueur de ce règlement :

  • L’étude du fonds de prévoyance devra être obtenue dans les 3 ans qui suivront l’entrée en vigueur de ce premier règlement (donc avant le 14 août 2028) ;

  • Le syndicat devra rendre disponible l’étude du fonds de prévoyance dans les 60 jours de la date à laquelle cette étude doit être obtenue.

Cependant, une étude réalisée dans les 2 ans précédents l’entrée en vigueur du Règlement sera reconnue valide pour 5 ans si elle a été effectuée par un professionnel mentionné au Règlement (voir ci-haut l’énumération des professionnels reconnus).

Dès l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions, le conseil d’administration devra au plus tard dans les 30 jours qui suivront la première assemblée annuelle qui sera tenue après l’obtention de la première étude du fonds de prévoyance, fixez les sommes à verser au fonds de prévoyance. Si l’étude du fonds de prévoyance révèle que ce fonds s’avère insuffisant pour couvrir le coût estimatif des réparations majeures et du remplacement des parties communes, le conseil d’administration devra fixer les sommes qui devront être versées annuellement à ce fonds, pour que celui-ci soit suffisant après une période d’au plus 10 ans de la date de l’obtention de la première étude du fonds de prévoyance.

LA CONFECTION ET LA TENUE DU CARNET D’ENTRETIEN DE L’IMMEUBLE

La loi introduit une nouvelle notion : le carnet d’entretien. Le syndicat devra établir, maintenir à jour et faire réviser périodiquement un carnet d’entretien de l’immeuble, qui décrira notamment les entretiens faits et à faire.

Ce carnet devra être établi par les mêmes professionnels (à l’exception d’un membre de l’ordre des comptables-professionnels agréés du Québec), avec les mêmes qualifications et règles d’indépendance que celles énumérées pour l’étude du fonds de prévoyance.

Il devra contenir :

  • Un inventaire et une description des parties communes de l’immeuble et des matériaux, appareils et équipements qui les composent de même que ceux situés dans les parties privatives et dont le syndicat est responsable de l’entretien ;

  • Pour chacun de ces matériaux, appareils et équipements :

    • Sa date d’installation si connue ;

    • Les travaux d’entretien requis et la fréquence à laquelle ils doivent être effectués et la date à laquelle ils ont été faits ;

    • Les réparations courantes et la date à laquelle elles ont été effectuées ;

    • Les contrats conclus pour la réalisation de ces travaux d’entretien et de réparations courantes, les contrats de garantie en vigueur, les rapports de toutes inspection ou expertise effectuée, le cas échéant ;

    • Les manuels d’entretien du fabricant, le cas échéant.

  • Une évaluation de l’état et de la durée de vie utile restante des matériaux, appareils et équipements décrits au carnet d’entretien, avec une description des réparations majeures et des remplacements à effectuer sur chacun d’eux au cours des 25 prochaines années ;

  • Les réparations majeures et les remplacements effectués, de même que leur date de réalisation, accompagnés des documents portant sur ces travaux, tels que les plans, devis et contrats.

Ce carnet d’entretien doit être mis à jour au moins une fois par année, en y ajoutant tout nouveau renseignement ou document visant les éléments ci-devant.

Le carnet d’entretien devra être révisé par les mêmes professionnels habilités à le préparer, minimalement à tous les 5 ans. Cependant, cette période pourra être portée à 10 ans dans les situations suivantes :

  • L’immeuble est constitué d’au plus 8 parties privatives (excluant les parties privatives accessoires tels les espaces de stationnement et de rangement) ; et,

  • Aucune partie commune de l’immeuble n’est située dans un bâtiment ; et,

  • L’immeuble a au plus 3 étages entièrement hors sol.

Pour les copropriétés établies avant l’entrée en vigueur de la loi :

  • Le carnet devra être obtenu dans les 3 ans qui suivront l’entrée en vigueur de ce premier règlement ;

  • Le syndicat devra rendre disponible le carnet d’entretien dans les 60 jours de la date à laquelle celui-ci a été obtenu.

Cependant, un carnet d’entretien réalisé dans les 2 ans précédents l’entrée en vigueur du Règlement sera reconnue valide pour 5 ans s’il a été confectionné par un professionnel mentionné au Règlement (voir ci-haut l’énumération des professionnels reconnus).

Ce carnet d’entretien fait partie des documents que le syndicat devra tenir à la disposition des copropriétaires.

L’ATTESTATION DE L’ÉTAT DES FINANCES ET DE L’IMMEUBLE DE LA COPROPRIÉTÉ

Une nouvelle obligation est finalement faite au syndicat, soit celle de tenir à jour une attestation sur l’état de ses finances et de l’immeuble. Une telle attestation doit être remise à tout copropriétaire qui en fait la demande, moyennant le paiement de frais raisonnables, dans les 15 jours de la demande.

Cette attestation du syndicat sur l’état de la copropriété doit contenir minimalement les renseignements suivants :

  1. i) Le montant total du fonds de prévoyance ainsi que la recommandation de l’étude du fonds de prévoyance quant au montant minimum devant être disponible à ce fonds au début de l’année en cours ;

  2. ii) Le montant total des contributions aux charges communes exigées des copropriétaires par le syndicat lors des 3 années précédentes, et le montant total des contributions aux charges communes payées par les copropriétaires au cours de cette période ;

  • iii) Le montant total des liquidités dont dispose le syndicat pour payer les dépenses courantes de fonctionnement de la copropriété ;

  1. iv) Le montant du surplus ou du déficit annuel apparaissant aux 3 derniers états financiers de la copropriété ;

  2. v) Une mention à l’effet que le syndicat est le titulaire des polices d’assurance auxquelles il doit souscrire en vertu de l’article 1073 du Code civil ;

  3. vi) Le montant total du fonds d’auto-assurance et le montant de la plus haute franchise prévue par les assurances souscrites par le syndicat ;

  • vii) Une description sommaire :

    1. i) Des inspections et expertises réalisées à l’initiative du syndicat, au cours des 5 dernières années, qui ont porté sur l’état général de l’immeuble ou de l’une de ses principales composantes

    2. ii) Des sinistres ayant affecté, au cours des 5 dernières années, la partie privative faisant l’objet de la vente ou les parties communes de l’immeuble ;

  • iii) Des réparations majeures et des remplacements effectués sur les parties communes au cours des 5 dernières années, et ceux prévus pour les 10 prochaines années, ainsi que la date de ces travaux et leur coût ou leur coût estimé ;

  1. iv) Des litiges en cours auxquels fait partie le syndicat et qui font l’objet d’une procédure devant un tribunal ;

  2. v) Des modifications apportées, au cours des 3 dernières années à la déclaration de copropriété.

L’attestation doit être datée et comporter la signature de la personne autorisée à la donner ainsi que son nom et sa qualité.

Le présent texte ne représente qu’un survol des questions juridiques présentées et ne constitue aucunement une opinion juridique en soi ni ne remplace une consultation avec un professionnel du droit, chaque dossier devant être analysé à la lumière des faits qui lui sont propres. N’hésitez pas à contacter notre cabinet de professionnels situé sur la Rive-Sud, à Longueuil.

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