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Personne et famille

Publié par - 22 mars 2023

La garde des enfants est souvent un enjeu central dans le cadre d’une séparation ou d’un divorce. De nombreux conflits peuvent survenir lors de la détermination de la garde, dont la question du parent souhaitant déménager avec l’enfant dans une nouvelle ville, province et parfois même dans un pays étranger. Une récente décision de la Cour d’appel portant sur cette question[1] est venue apporter certaines précisions.

Au sens de la loi, qu’est-ce qu’un déménagement important?

La Loi sur le divorce définit le déménagement important comme étant « tout changement du lieu de résidence d’un enfant […] ou d’une personne ayant du temps parental […] s’il est vraisemblable que ce changement ait une incidence importante sur les rapports de l’enfant avec […] une personne ayant du temps parental ou des responsabilités décisionnelles à l’égard de l’enfant […] »[2].

Ainsi, on sera en présence d’un déménagement important si, à la suite de ce déménagement, les rapports entre l’enfant et son autre parent sont touchés de façon importante. D’ailleurs, dans les cas de conjoints non mariés, les tribunaux se réfèrent à cette même définition lorsqu’une question de déménagement se pose.

Le déménagement important sera-t-il autorisé?

Un tribunal appelé à statuer sur un déménagement important l’autorisera lorsque celui-ci est dans l’intérêt de l’enfant[3]. La jurisprudence a dégagé plusieurs critères à analyser afin de déterminer si le déménagement important est dans l’intérêt de l’enfant, notamment : toute entente de garde déjà conclue ainsi que la relation actuelle entre l’enfant et le parent gardien, l’avantage de maximiser les contacts entre l’enfant et les deux parents, l’opinion de l’enfant, la raison pour laquelle le parent gardien déménage, la perturbation que peut causer chez l’enfant une modification de garde et la perturbation que peut causer chez l’enfant l’éloignement de sa famille, des écoles et du milieu auquel il s’est habitué[4].

Il est toutefois important de noter que les tribunaux n’allouent plus d’importance à savoir si le parent qui souhaite déménager le ferait sans l’enfant dans l’éventualité où sa demande ne serait pas accordée. Ce principe est d’ailleurs désormais prévu par la Loi sur le divorce[5].

Les modifications apportées à la Loi sur le divorce, entrées en vigueur en 2021 ont eu un impact important quant à l’analyse que doivent faire les tribunaux afin de répondre à ce type de question. Parmi les modifications, on peut noter l’ajout d’une disposition prévoyant une liste de critères supplémentaires à analyser lors d’un déménagement important[6], ainsi que l’ajout d’une disposition spécifique concernant la nécessité d’analyser la présence de violence familiale lorsque vient le temps de déterminer l’intérêt de l’enfant[7]. De plus, la Loi a été modifiée afin de modifier le fardeau de preuve lorsque vient le temps de démontrer que le déménagement important est dans l’intérêt de l’enfant[8].

Décision récente de la Cour d’appel

À cet égard, en février 2023, la Cour d’appel dans la décision Droit de la famille — 23190[9] afin de préciser certains éléments découlant des modifications apportées à la Loi sur le divorce. D’abord, elle vient expliquer les trois cas de figure prévus par la Loi relativement au fardeau de preuve. Ainsi, lorsque l’enfant est en garde partagée (ou son équivalent), le fardeau de démontrer que le déménagement est dans l’intérêt de l’enfant reposera sur les épaules du parent désirant déménager. Lorsque l’enfant est plutôt à la charge du parent qui souhaite déménager dans la « très large majorité du temps », ce sera au parent qui s’oppose au déménagement de prouver que ce dernier n’est pas dans l’intérêt de l’enfant. Finalement, dans toute autre situation, les deux parents devront chacun argumenter leurs positions respectives sans qu’un fardeau repose sur l’un d’entre eux en particulier. Dans tous les cas, l’analyse du juge sera centrée sur l’intérêt de l’enfant au déménagement au vu des critères applicables.

La Cour d’appel vient également préciser l’évaluation de certains critères de l’analyse du déménagement important. La Cour doit d’abord déterminer si le fait que le parent souhaitant déménager soit la figure parentale dominante de l’enfant est un facteur pertinent. Toutefois, la Cour précise qu’il ne faut pas que ce parent puisse bénéficier de cette situation lors de l’analyse du déménagement lorsqu’il a créé cet état de fait par stratagème ou subterfuge.

La Cour s’attarde ensuite au critère de l’intérêt du parent souhaitant le déménagement ou, autrement dit, des raisons pour lesquelles celui-ci souhaite déménager. Cette considération est pertinente lorsque vient le temps de déterminer l’intérêt de l’enfant au déménagement lorsque les raisons du parent à déménager s’articulent autour d’une amélioration de sa situation personnelle (nouvel/meilleur emploi, rapprochement de la famille élargie, etc.).

Les raisons du déménagement seront aussi pertinentes lorsqu’elles visent plutôt à nuire à l’autre parent et à l’exclure de la vie de l’enfant, auquel cas le tribunal pourrait en venir à refuser le déménagement.

Une question complexe selon chaque cas

La question du déménagement important de l’un des parents avec un enfant, lors d’un divorce ou d’une séparation, est une question complexe dans laquelle entrent en compte plusieurs facteurs et le présent article n’a pour but que de faire un bref survol du concept de déménagement important de l’un des parents dans le cadre d’un litige sur la garde des enfants en matière familiale à la lumière d’une décision récente de la Cour d’appel. Ainsi, si vous vous questionnez à savoir comment ceci peut s’appliquer à vous, n’hésitez pas de communiquer avec nous et il nous fera un plaisir de regarder cela de façon plus approfondie avec vous à la lumière de vos faits particuliers.

 

[1] Droit de la famille — 23190, 2023 QCCA 207.

[2] Article 2(1), Loi sur le divorce, LRC 1985, c 3 (2e suppl.).

[3] Droit de la famille — 172102, 2017 QCCA 1367.

[4] Id.

[5] Article 16.92(2), Loi sur le divorce, LRC 1985, c 3 (2e suppl.).

[6] Article 16.92(1) Loi sur le divorce.

[7] Article 16(3)j) Loi sur le divorce.

[8] Article 16.93 Loi sur le divorce.

[9] 2023 QCCA 207.

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