Droit immobilier, Litige et médiation
Publié par Martin Fortier - 5 septembre 2019
Acheter directement d’un proprio, c’est prendre un risque!
Dans un jugement daté de mars 2019[1], la Cour supérieure a prononcé l’annulation de la vente d’un immeuble intergénérationnel et condamné la vendeuse à rembourser aux acheteurs le prix de vente de la propriété (337 000$) et les dépenses qui ont servi à l’amélioration de celle-ci (52 633 $). La vendeuse a également dû verser la somme de 45 000 $ aux acheteurs en dommages pour les troubles et inconvénients qu’ils avaient subis.
Dans cette affaire, les demandeurs se sont portés acquéreurs de la propriété en litige en 2014 avec pour objectif connu d’y habiter et de loger la mère de l’un d’eux dans l’unité de type garçonnière. En juillet 2015, ils ont reçu un avis d’infraction de la Ville à l’effet que cette unité contrevenait à la réglementation et aurait été construite sans permis. Un avis concernant l’illégalité de l’unité est aussi envoyé à la vendeuse. Cette dernière nie toute responsabilité.
La preuve au dossier a révélé qu’il aurait coûté aux acheteurs entre 62 905 $ et 136 400 $ pour rendre l’immeuble conforme à la réglementation et aurait requis que des modifications substantielles soient apportées à celui-ci. Ainsi, ils ne pouvaient bénéficier d’une maison intergénérationnelle alors que la vendeuse s’était engagée à leur vendre un immeuble de ce type.
Malgré la Déclaration du vendeur qui déclarait que l’entrée indépendante de la garçonnière avait été construite sans permis, le tribunal a conclu que cela n’équivalait pas à une dénonciation et induisait les acheteurs en erreur. En effet, elle n’avait pas avisé les acheteurs que la construction même du logement avait été effectuée sans permis. Au surplus, le tribunal indique :
(72) « Les acheteurs sont inexpérimentés. Il s’agit de leur première maison. La transaction se fait par entremise de Du Proprio, c’est-à-dire sans agent, ni courtier. Chacune des parties est privée des conseils qu’un courtier aurait pu leur fournir.»
Dans son analyse, le tribunal a réitéré que la Cour d’appel avait déjà tranché à l’effet que l’obligation de délivrance de l’immeuble était une obligation de résultat, si bien qu’il existe une présomption que le vendeur connaissait l’ensemble des charges qui affectent l’utilisation de sa propriété.
Dans le présent cas, la vendeuse s’était engagée à livrer une maison intergénérationnelle aux acheteurs, ce à quoi elle a failli, d’autant plus qu’elle leur avait faussement laissé croire que le tout était conforme.
Le présent texte ne représente qu’un survol de la question juridique et ne constitue aucunement une opinion juridique en soi. Chaque dossier se doit d’être analysé à la lumière des faits qui lui sont propres.
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[1] Bissonnette c. Mathon, 2019 QCCS 881